
Alors que la coalition affirme contrôler l’espace aérien de la Libye, la menace de missiles SAM n’est toujours pas exclue selon certains experts militaires.
Si l’établissement d’une zone d’exclusion aérienne sur la Libye n’a pas constitué un énorme défi pour la coalition, l’opération a révélé de sérieux écueils politiques et militaires.
L’un d’eux est la menace inattendue du système anti-aérien 9K338 Igla-S (code OTAN SA-24 « Grinch ») de fabrication russe et opéré par la Libye durant l’opération Aube de l’Odyssée. Ce missile SAM (surface-to-air missile) peut être tiré de façon portative sur l’épaule d’un soldat. Il est probable qu’il ait servi à abattre le F-15E américain dans la nuit du 21 mars.
Sa présence sur le champ de bataille souligne la nécessité pour les pays de la coalition de tirer parti de l’éventail complet des capacités de guerre électronique pour poursuivre leur campagne aérienne. Le missile constitue également une sérieuse menace pour les avions volant à basse altitude et destinés aux missions de secours médicaux, d’évacuation et de reconstruction. Ces missiles ont été introduits sur le marché noir et placés entre les mains de groupes armés sans foi ni loi, qui veulent soutenir l’une ou l’autre des parties dans le conflit libyen.
La présence de ces missiles a été une surprise pour les analystes militaires américains et internationaux. Des rumeurs circulent au sujet d’un possible Igla-S/SA-24 vendu à la Libye, mais il n’est mentionné nul part dans les registres d’armes de l’ONU. Des photos du SA-24 ont également fait leur apparition à la télévision depuis le début de la guerre, mais elles n’ont pas été publiquement identifiées par la communauté du renseignement.
«Le SA-24, ou Igla-S, est une variante améliorée du SA-18 ‘Grouse’ avec de meilleures performances, notamment face aux contre-mesures», commente Douglas Barrie, expert de l’aérospatiale militaire à l’Institut international de Londres pour les études stratégiques. « Il est censé avoir une portée maximale de 6.000 mètres, et une altitude maximale d’engagement de 3.500 mètres. Le développement du système semble avoir été achevé au début des années 2000. Le SA-24 représente une menace crédible pour des avions, des hélicoptères et des drones. » ajoute t-il.
La question est de savoir si les systèmes de missiles SA-24 vendus aux Libyens peuvent être démontés de leurs camions et utilisés comme des systèmes portatifs de défense sol-air MANPADS (Man-portable air-defense systems), ou s’ils font partie d’un système intégré. D’après les photos prises (ci-dessus), la flexibilité de l’arme n’est pas évidente.
« Si vous me demandez quelle menace constituent les SAM à l’heure actuelle, je répondrais que les batteries mobiles Geckos [SA-6« Gainfuls et SA-8 montés sur des véhicules à chenilles et SA-24 soudés sur des camionnettes ] sont plus difficiles à cibler que des batteries fixes », explique un fonctionnaire de la défense des États-Unis. « Les plus mobiles sont extrêmement dangereux, ce sont les systèmes MANPADS (portatifs) guidés par radar. »
La menace des SAM à guidage radar a conduit le Pentagone à engager ses chasseurs embarqués de guerre électronique EA-18G Growlers sur la Libye. L’Italie a également déployé des Tornado ECR destinés à la localisation radar.
Les SAM à long rayon d’action (SLR) sont guidés par des radars SA-6 (altitude de 7 km) et SA-8 (altitude de 5 km). Les SAM mobiles sont toujours en mouvement, mais les systèmes de missiles à guidage radar doivent assurer leurs communications et leurs liaisons de données qui sont dégradées par les attaques électroniques (brouillage et cyber-pénétration), affirment les officiels américains qui analysent la campagne en temps réel. Cela ne laisse que les armes guidées et à guidage infrarouge comme principale menace pour les aéronefs de la coalition survolant la Libye. Le SA-24 est donc la menace la plus sérieuse actuellement.
« Ce n’est pas une opération sans risque», explique un analyste de la défense des États-Unis. «Nous mettons les pilotes en danger. Mais les avions de la coalition sont les seuls présents dans le ciel à l’heure actuelle, il n’y a plus d’avions libyens. »



